interview en francais par la journaliste eloise maillot

1/ Impression de retomber toujours dans les mêmes problèmes

La première chose que je leur recommanderais, c'est d'examiner leur arbre généalogique. C’est sans doute mon approche de thérapeute en constellations familiales qui parle, mais dans la plupart des cas, lorsqu'un même problème persiste ou qu'un comportement toxique se répète malgré une prise de conscience, cela dépasse notre simple volonté. Nous voyons le drapeau rouge, savons que c’est une fausse route, et pourtant, nous y retournons comme si c’était plus fort que nous. Ce type de schéma répétitif est très souvent lié à une mémoire cellulaire ou à un comportement hérité de notre système familial. Il se peut qu’un membre de notre famille ait besoin d’être reconnu, entendu et vu à travers nous. En prenant le temps d’explorer notre histoire familiale, en dressant un arbre généalogique et en établissant des connexions, nous réalisons parfois que notre mère, notre tante, notre grand-mère ou un autre ancêtre a vécu des situations similaires.

Si le problème est conscient, c’est peut-être le signe qu’il y a encore un besoin de comprendre, une blessure à guérir, une leçon à intégrer. Mais pour moi, l’impression de retomber toujours dans les mêmes problèmes est majoritairement connectée à notre histoire familiale. Nous tentons inconsciemment de réparer quelque chose, qui, à l’origine, ne nous appartenait pas. C'est ce que j’explique en profondeur dans mon livre Les constellations familiales (Éditions Trédaniel) : nous sommes souvent en train de guérir, de résoudre un problème ancien, avec notre « loyauté inconsciente » dont je parle beaucoup. Voilà pourquoi il est essentiel d’explorer notre passé familial si nous voulons briser ces cycles répétitifs.

2/ Sensation de ne jamais réussir assez bien

Depuis toujours, la société patriarcale inculque aux femmes l’idée de ne jamais être « assez ». Chaque choix semble soumis à une forme de jugement et de conditionnement : maternité, corps, péri ménopause, ménopause, carrière, relations… Avoir un enfant ne suffit pas, il en faudrait un deuxième, puis un troisième. L’allaitement épuise, mais le biberon n’est pas bien, idem si les femmes ne reprennent pas leur poids de forme rapidement après l’accouchement. Prendre une nourrice paraît égoïste, mais renoncer à sa carrière manque d’ambition. Se marier tôt semble précipité, attendre trop donne l’impression d’un échec. Depuis cinq ou six ans, un changement est né. Les femmes commencent à voir qu’elles sont très bien comme elles sont. Des super podcasts comme Allez j’ose ! d’Elsa Wolinski ou Mesdames, de Maïtena Biraben, valorisent des femmes bien dans leur peau, des femmes sexys.

Le vrai courage est de décider de sa vie et de refuser ce patriarcat qui est contre le bonheur féminin. Il faut se libérer de ces carcans et même si cela commence à changer, il faudra, je pense, une génération – celle de 2020 – pour s’en affranchir entièrement.  Avoir eu des parents qui nous laissent nous exprimer joue un rôle essentiel dans la construction de cette confiance, sans injonctions qui nous brident avant l’âge de six ans (« tais-toi » ; « ne pleure pas » … ). Recevoir un soutien parental bienveillant dès l’enfance facilite l’épanouissement personnel. Lorsque cela a fait défaut, renouer avec l’enfant intérieur permet d’apporter aujourd’hui ce qui a manqué hier. Faire une thérapie permet de casser ces schémas transmis de génération en génération. Devenez ce parent que vous auriez voulu avoir, et donnez à ce petit enfant ce que vous auriez voulu recevoir. Il existe toujours une solution. S’entourer de personnes bienveillantes, positives qui expriment beaucoup de compassion est primordial.

3/ Tendance à toujours voir le mauvais côté des choses

Ces femmes cherchent avant tout à se protéger. Anticiper le pire procure une illusion de contrôle : si l’événement redouté survient, l’esprit s’y est déjà préparé, réduisant ainsi l’impact émotionnel. Cette vision négative naît souvent d’une grande sensibilité et d’une peur de souffrir.

L’enfance joue un rôle clé dans ce mécanisme. Grandir auprès d’un parent anxieux peut inculquer cette tendance à se méfier de la vie. Certaines phrases entendues durant l’enfance, même anodines en apparence, nourrissent un sentiment de culpabilité et de peur du manque. Un environnement marqué par des injonctions culpabilisantes ou une anxiété omniprésente renforce ce besoin de vigilance constante.

Derrière cette attitude, une profonde insécurité se cache souvent. Demander de l’aide devient difficile, par crainte d’être un fardeau ou de provoquer du stress chez l’autre. Pourtant, accepter du soutien et reconnaître sa propre valeur permettent d’entrevoir les joies de l’existence. Rien n’est figé, ni le mal ni le bien. Ces femmes méritent avant tout de la douceur et de la bienveillance. J’ai beaucoup de compassion pour ces femmes, je pense qu’elles sont merveilleuses et qu’elles doivent juste comprendre que rien ne dure, ni le bon, ni le mauvais et donc de prendre soin de ces moments de bonheur.

4/ Tendance à toujours me préoccuper plus des autres que de moi

Donner davantage permet souvent de garder le contrôle. Recevoir implique de se montrer vulnérable, d’exprimer ses besoins, ses envies et ses rêves, avec le risque d’essuyer un refus. Derrière cette difficulté à recevoir se cache bien souvent une peur plus profonde de l’abandon ou du rejet.

S’occuper des autres évite aussi de se confronter à ses propres blessures et de soi. Beaucoup de femmes deviennent mères pour s’oublier, pour se consacrer entièrement à quelqu’un d’autre, parfois au détriment de leur propre bien-être. Prendre soin de soi ne relève pas de l’égoïsme mais de l’équilibre : une heure de sport, un massage ou un moment de méditation permettent de mieux gérer le quotidien. Vous vous devez de prendre soin de vous ! Des enfants heureux, c’est une maman heureuse, une épouse heureuse et donc une femme heureuse. Il faut leur inculquer de prendre soin de soi en leur montrant. Les enfants le comprendront en grandissant.  

Dès l’enfance, les femmes entendent qu’elles doivent penser aux autres avant elles-mêmes. Ce modèle du sacrifice féminin et maternel perdure, mais les mentalités évoluent. Il ne s’agit plus de se perdre dans un rôle imposé, mais d’affirmer son individualité tout en restant fidèle à soi-même. Le modèle des années 1980 où il fallait devenir un homme pour réussir a détruit une génération qui s’est perdue dans ce déséquilibre masculin-féminin. Nous sommes en train de refaire confiance au masculin et de retourner dans notre féminin. S’occuper des autres crée des colères, qui sont certes valides mais restent une fuite. Se préserver, fixer des limites et assumer ses propres besoins permet d’entretenir des relations plus saines et harmonieuses. Être égoïste n’a rien de négatif : c’est une nécessité pour s’épanouir pleinement.

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Your parents’ relationship isn’t your responsibility!

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